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Dans quelles conditions les policiers peuvent-ils utiliser leurs armes ?

Le 27 juin 2023
Dans quelles conditions les policiers peuvent-ils utiliser leurs armes ?
Quel est le cadre légal de l'usage des armes par les fonctionnaires de la police nationale ou les militaires de la gendarmerie en France ? Un refus d'obtempérer est-il suffisant ? Maître François LEGER, Avocat pénaliste vous répond.

L'usage des armes par les policiers et gendarmes est encadré par la Loi et plus précisément par le Code de la sécurité intérieure et par le Code pénal.

I. Les dispositions du code de la sécurité intérieure : l'article L435-1

La loi n°2017-258 du 28 février 2017 a créé l'article L435-1 du Code de la sécurité intérieure qui prévoit cinq cas d'usage des armes par les forces de l'ordre (police ou gendarmerie) à conditions toutefois de remplir quatre conditions préalables

1. Les conditions préalables à l'usage d'une arme : 

  • Les policiers ou gendarmes doivent être dans l'exercice de leurs fonctions. Ce qui signifie que le fonctionnaire de police ou le militaire de la gendarmerie nationale doit être en service au moment où il fait usage de son arme à feu. Néanmoins, et dans la mesure où ces derniers ont l'obligation d'intervenir même hors service en vertu de l'article R434-19 du Code de la sécurité intérieur, cette condition ne posera pas de difficulté. 
  • Ils doivent porter l'uniforme ou être identifiables par le port de tout insigne extérieur et apparent (brassard, gilets, etc...).
  • Les forces de l'ordre doivent agir dans le cadre d'une absolue nécessité : l'usage de l'arme doit être l'ultime recours pour éviter l'atteinte à la vie ou l'intégrité physique d'eux-mêmes ou d'autrui. La Justice apprécie cette condition de manière in concreto, c'est à dire à partir des circonstances de l'espèce.
  • La riposte doit être strictement proportionnée: le policier ou le gendarme dispose d'armes de force intermédiaire (Tonfa, Bâton télescopique, pistolet à impulsion électrique, bombe lacrymogène...) qu'il peut utiliser en fonction de la menace. L'usage de l'arme à feu doit être le seul moyen de mettre fin au péril.

2. Les cinq cas prévus par l'article L435-1 du Code de la sécurité intérieure :

  1. La légitime défense d'eux-mêmes ou d'autrui : "Lorsque des atteintes à la vie ou à l'intégrité physique sont portées contre eux ou contre autrui ou lorsque des personnes armées menacent leur vie ou leur intégrité physique ou celles d'autrui". Il s'agit de la reprise de la notion de légitime défense énoncée à l'article 122-5 du Code pénal. 
  2. La défense d'un lieu occupé ou d'une personne confiée, après sommations : "Lorsque, après deux sommations faites à haute voix, ils ne peuvent défendre autrement les lieux qu'ils occupent ou les personnes qui leur sont confiées". Il peut s'agir d'un lieu protégé comme un commissariat, une brigade de gendarmerie, un ministère, un palais de justice ou encore d'un centre pénitentiaire. S'agissant des personnes confiées, la condition est large et vise toute personne confiée aux autorités policières telles que les personnalités publiques, les personnes gardées à vue, etc. 
  3. L'interpellation d'une personne en fuite qui pourrait être dangereux: "Lorsque, immédiatement après deux sommations adressées à haute voix, ils ne peuvent contraindre à s'arrêter, autrement que par l'usage des armes, des personnes qui cherchent à échapper à leur garde ou à leurs investigations et qui sont susceptibles de perpétrer, dans leur fuite, des atteintes à leur vie ou à leur intégrité physique ou à celles d'autrui". Pour utiliser le bénéfice de cette disposition, les policiers devront démontrer par des éléments objectifs, la dangerosité du mise en cause. Il est également indispensable de procéder à deux sommations à haute voix.
  4. L'immobilisation d'un véhicule après refus d'obtempérer : "Lorsqu'ils ne peuvent immobiliser, autrement que par l'usage des armes, des véhicules, embarcations ou autres moyens de transport, dont les conducteurs n'obtempèrent pas à l'ordre d'arrêt et dont les occupants sont susceptibles de perpétrer, dans leur fuite, des atteintes à leur vie ou à leur intégrité physique ou à celles d'autrui". Là encore, il est indispensable que les policiers ou gendarmes aient effectué des ordres d'arrêt et qu'il soit démontré, par des éléments objectifs, la dangerosité potentielle des occupants du véhicule.
  5. Le périple meurtrier : "Dans le but exclusif d'empêcher la réitération, dans un temps rapproché, d'un ou de plusieurs meurtres ou tentatives de meurtre venant d'être commis, lorsqu'ils ont des raisons réelles et objectives d'estimer que cette réitération est probable au regard des informations dont ils disposent au moment où ils font usage de leurs armes". Il s'agit de la reprise de l'article 122-4-1 du Code pénal instauré après les attentats de 2015. Ce texte autorise les forces de l'ordre à ouvrir le feu sur une personne qui viendrait de commettre un ou plusieurs meurtres ou tentatives de meurtre et qui serait susceptible d'en commettre d'autres dans un temps rapproché, alors même qu'au moment de l'usage de l'arme par les policiers, les conditions de la légitime défense ne seraient pas remplies, notamment la condition de simultanéité. Aucune sommation n'est exigée pour cette disposition.

Il est important de préciser que l'article L435-1 du Code de la sécurité intérieure s'applique également aux policiers municipaux pour le premier cas (article L511-5-1 du CSI), aux douaniers et aux militaires de l'opération Sentinelle (pour l'ensemble des cas) ainsi qu'à l'administration pénitentiaire (pour le premier et le deuxième cas).

II. Les dispositions du code pénal : la légitime défense de l'article 122-5

Le Code pénal prévoit un fait justificatif de légitime défense, exonératoire de responsabilité pénale. 

Ce texte est applicable à n'importe quel justiciable.

Les forces de l'ordre peuvent donc s'en prévaloir, dans l'hypothèse où les conditions prévues à l'article L435-1 du Code de la sécurité intérieure ne seraient pas remplies. 

Aux termes du premier alinéa de l’article 122-5 du Code pénal :

"N'est pas pénalement responsable la personne qui, devant une atteinte injustifiée envers elle-même ou autrui, accomplit, dans le même temps, un acte commandé par la nécessité de la légitime défense d'elle-même ou d'autrui, sauf s'il y a disproportion entre les moyens de défense employés et la gravité de l'atteinte".

Quatre conditions sont nécessaires pour justifier de ce fait justificatif, il faut démontrer :

  • une atteinte injustifiée envers soi-même ou autrui,
  • une riposte nécessaire,
  • une proportionnée entre les moyens de défense employés et la gravité de l'atteinte,
  • une simultanéité entre l'atteinte et la riposte.

S'agissant de la nécessité, la jurisprudence considère que la légitime défense « n’a pas seulement en vue le cas d’une nécessité éclatante, absolue, indiscutable, mais encore le cas où celui qui se défend peut raisonnablement croire qu’il se trouve en péril » (Chambéry, 6 février 1907)

Par conséquent, il appartient aux juges du fond d’apprécier les conditions de la légitime défense au cas par cas.

Enfin, s’agissant du critère de proportionnalité, la Cour de cassation considère que le résultat de l’acte de défense est indifférent (Cour de cassation, Chambre Criminelle, 17 janvier 2017, n°15-86.481).

L'article 122-6 du Code pénal prévoit quant à lui, une présomption de légitime défense dans deux situations

  • "Pour repousser, de nuit, l'entrée par effraction, violence ou ruse dans un lieu habité ;
  • Pour se défendre contre les auteurs de vols ou de pillages exécutés avec violence".

Des questions sur la légitime défense ou sur l'usage des armes par les policiers ? Consulter votre avocat pénaliste à Versailles dans les Yvelines pour vous répondre !

Maître François LEGER intervient en droit pénal et en procédure pénale en Ile de France. 

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